On refait le monde sur radio UNCP

Publié le par Romain Ferretti

P4200004.JPGUn mois avant de rentrer en France, mon ami Erik m’avait demandé si je ne voulais pas participer à un programme hebdomadaire de la radio de sa fac. Le thème de l’émission : la citoyenneté, comparaison Pérou – France.

 

Me voilà donc à 9h00 du matin devant un micro. Lui ayant dit de manière informelle que je faisais mon mémoire sur le budget participatif, j’ai été à mon grand regret présenté comme spécialiste en la matière. Dur dur d’expliquer au présentateur que l’on a juste fait un mémoire dessus, surtout quand celui-ci le balance en live aux auditeurs. Donc je ne dis rien mais n’en pense pas moins « Comment je vais faire pendant une heure ? » L’animateur n’est en effet rien de moins que le professeur d’anthropologie d’Erik, et il a ramené quelques potes, qui au vu des premières questions m’ont l’air bien calés. Qu’à cela ne tienne, j’ai plutôt droit à des questions qu’à des affirmations. La porte n’est donc pas fermée…

 

Et ça commence très fort par un petit « Je ne comprends pas comment la France, le pays des droits de l’Homme, a pu élire un président d’extrême droite ! Comment expliquez-vous cela ? ». Et là, j’ai fait quelque chose dont je ne me serais jamais cru capable : j’ai défendu Nicolas Sarkozy ! Il a fallu expliquer qu’on avait notre Jean-Marie national qui occupait déjà le créneau, et que Sarko ne faisait pas parti (officiellement) de l’extrême droite. Bon j’ai quand même nuancé, je n’ai pas pu m’empêcher d’expliquer que, selon moi, il avait des idées conservatrices et parfois (souvent ?) limite dégueulasses, comme la nouvelle proposition de loi sur les tests ADN (je venais tout juste de l’apprendre d’ailleurs). Vous auriez-vous la tête des Péruviens quand je leur ai donné cet exemple là, on aurait dit qu’un mythe s’écroulait…

 

« Mais alors, la France n’accueille plus d’immigrés ? ». Dur constat que de répondre qu’elle en accueille encore mais que ce sont seulement les plus qualifiés qui l’intéressent. Et de ressortir les concepts d’immigration choisie, de drain brain… bref, je n’étais pas très fier de descendre mon pays comme ça. D’autant plus que j’avais déjà décelé une réelle admiration émanant de mes camarades envers la France. S’il y a bien une chose qui va de paire avec France pour eux, c’est une date : 1789. Je l’ai entendue plusieurs fois ans la bouche des enfants, et l’ai même vue dans leurs livres d’Histoire. Mais que voulez-vous, c’est ça la rupture. Et pour rompre, ça a rompu. Leur vision idéalisée d’une nation qui a certainement perdu de vue ses éléments fondateurs pour certains. Leurs illusions de lendemains meilleurs pour d’autres. J’ai donc eu de nouveau droit à l’allusion Sarkozy = extrême droite, que j’ai de nouveau dû nuancer.

 

On me demande ensuite comment va la gauche dans notre pays. J’allais pas leur mentir, c’est pas la joie ni chez les rouges, ni chez les roses et ni chez les verts. J’explique que par exemple le communisme a perdu de son influence dans le pays suite à la restructuration du tissu économique français, faisant inéluctablement diminuer la production industrielle, et donc les emplois ouvriers, premier vivier d’électeurs du PC. J’explique aussi que le parti socialiste est tiraillé entre ceux qui se veulent réalistes, décidés à promouvoir une mondialisation sociale, et ceux qui croient toujours que la mondialisation peut être vaincue, un peu à la manière des Chavez, Morales et autres Ortega. Et je ne parle même pas des verts.

 

On me demande aussi comment fonctionne la démocratie en France, et surtout comment les citoyens y participent. J’explique que justement, sur ce point là, les Péruviens auraient des leçons à donner aux Français, car leur processus de budget participatif, inscrit dans leur constitution, n’existe quasiment pas chez nous. Ils n’en reviennent pas et nuancent à leur tour : ça ne marche pas non plus très bien chez eux, d’autant plus que la population n’est pas habituée à parler politique et ne peut confronter les idées, faute de médiatisation des enjeux politiques. Je me dis « Finalement, France-Pérou, même combat… on a beau voter, on se fait quand même prendre pour des c***… »

 

Et puis on se rend vite compte que l’heure est bientôt terminée. L’échange aura été très intéressant, tant pou eux que pour moi. J’en profite pour passer un bonjour à tous mes amis péruviens à qui j’avais dit que je passais justement ce dimanche matin sur Radio UNCP. Et je ne peux m’empêcher de pousser un petit coup de gueule... mesuré, par respect pour mes hôtes d’une heure qui m’avaient si gentiment invité à débattre. Je leur demande en effet pourquoi les Péruviens jettent tout dans leur nature si belle : sac plastique, boites et film plastique de cigarette, bouteilles, batteries de voitures, huile de vidange. Je n’aurai malheureusement en retour qu’une explication un peu gênée (et c’est fort logique) et à une attaque des compagnies minières qui ouvrent chaque année plus de mines à ciel ouvert.

 

En tous cas, cette émission restera l’un de mes meilleurs souvenirs de mon expérience péruvienne.
A quand la prochaine ?

Publié dans Personnel

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S
Tu imagines bien que si j'avais été à ta place, notre nain de nabot d'omniprésent de président, je n'aurai même pas osé prononcer son nom !
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